Nous ne sommes pas confinés, nous sommes couvre-feuïsés. Pas pareil !
Si nous étions confinés, nous ne pourrions pas bouger. Eh oui.
Pourquoi je dis cela ?
Quand soudain, ne voilà-t-il pas...
Eh oui, nous ne sommes pas confinés, mais couvre-feuïsés ; c 'est à dire soumis à un horaire à partir duquel il est interdit d'être dehors.
Moi, la première jour effectif du couvre-feu, je n'avais pas trop compris cette règle...
Ben oui : pour moi, le couvre-feu, c'était un peu comme le jeu "1, 2, 3 soleil !" : à partir de 18 heures, tu ne devais plus bouger de là où tu étais.
Tiens, en parlant de "1, 2, 3 soleil !", cela me rappelle ce moment passé avec un cheval sur le plateau de Sanchèse, dans la vallée d'Aspe, en octobre 2011.
Oui, nous sommes couvre-feuïsés ! C'est mieux que confinés.
Nous pouvons sortir, bouger, voir des gens. Mais pour faire quoi ? Pas moyen d'aller au resto, ou dans les bars ou dans les musées, ou à un concert, ou aller voir un match de rugby, ou aller faire du ski alpin.
Alors, vu comme ça, la sensation de liberté est étrange, mesurée. Cela me fait penser à ce dessin de Manuel Lapert...
Mais arrêtons de nous plaindre en attendant le retour de jours plus heureux.
Prenons le temps de ne faire que ce que l'on peut faire.
Que faire alors ?
S'instruire via internet...
J'ai eu ainsi envie de regarder quand était intervenu le premier couvre-feu et pourquoi.
"L'historiographie anglaise suggère que le couvre-feu fut une mesure répressive imposée par Guillaume le Conquérant aux Anglo-Saxons en 1068, probablement dans le but d'empêcher une rébellion et les fréquents incendies des habitations en bois à la suite de feux laissés imprudemment allumés. Cette mesure obligeait ainsi les habitants à couvrir le feu jusqu’à extinction, de 8 heures du soir à 6 heures du matin."WIKIPEDIA
Il n'en faut pas plus pour réveiller chez certains une allusion contemporaine au fonctionnement politique actuelle.
"On nous impose le couvre-feu, la fermeture des lieux de convivialité et de culture pour nous faire taire. Nous rentrons dans la routine du métro-boulot-dodo."
Je ne rentrerai pas dans ce débat. Ici, je me demande ce que je peux faire avec et contre ce que l'on nous impose.
Certes, la semaine, je travaille, de 10h à 18 h. Je ne peux donc pas trop sortir. Impossible d'aller voir le soleil se coucher sur l'horizon océanique.
Rationalisation : en même temps, c'est toujours un peu pareil les couchers de soleil. Et puis, en ce moment, il pleut.
Aller dans les centres commerciaux pour déambuler dans les multiples boutiques des galeries marchandes.
Ah non, pas possible. Ces grands centres commerciaux sont fermés depuis une semaine.
Boire un petit café en terrasse d'un magasin qui vend habituellement du pain.
Non plus.
Bon.
L'avantage quand tu habites dans le sud-ouest de la France -et plus précisément dans le Pays Basque-, c'est que tu peux aller voir chez les voisins étrangers quels aménagements ont ils fait pour lutter contre la propagation du virus.
En Espagne, et plus précisément à la frontière franco-espagnole, les règlementations changent/évoluent toutes les semaines.
Certes, comme en France, certains lieux de grand rassemblement sont fermés. C'est le cas pour les salles de jeux pour enfants.
On peut aller faire ces courses dans les vantas à condition d'être masqué et de respecter la distanciation sociale.
Et puis, la situation évolue.
Il y a deux semaines, à Dantxaria, les bars étaient ouverts et nous pouvions boire un verre au comptoir, ou en salle.
Et puis, la semaine d'après, les bars et restaurants de Dantxaria n'avaient plus le droit d'accueillir de clients dans leur établissement. Ils se sont donc adaptés de façon -je trouve- vraiment efficace, voire sarcastique.
Incroyables ces Espagnols, non ?
Peuple latin pour qui le contact humain est indispensable. Et puis, le Premier Ministre espagnol le disait : l'Espagne n'a pas les moyens de la France et ne peut se permettre d'aider les commerces fermés plus longtemps.
C'est aussi pour cela que la semaine d'après, aujourd'hui, il est interdit aux Français de venir faire leurs courses dans les ventas des frontières. Pourquoi ? Parce que l'essence, les cigarettes et autres produits sont détaxées. Autrement dit, il est normal que les Français ne profitent pas du système espagnol.
Fini donc d'aller manger dans les restaurants... tentes espagnoles ! Fini de boire des Gin tonic au comptoir d'un bar !
On revient en France.
À Saint-Pée-sur-Nivelle, les restaurateurs en ont marre.
Pour les aider, on achète quelques plats à emporter préparés chez eux. On achète également local pour se faire des petites bouffes entre amis, à condition de ne pas être plus de six à table.
Huitres d'Oléron Cochon de lait et gratin de légumes de la Ferme Elizaldia
Tu finis ton verre de vin rouge sans sulfite
car le sulfite, parait que c'est pas bon.
Tu ranges un peu tes tableaux...
Tu appelles les amis pour prendre
des nouvelles de leurs animaux de compagnie...
Nisca squatte le canapé depuis trois jours
Taïchi de combat ne trouvant toujours pas de réponse Pompon vérifie les niveaux
à la question qu'elle ne se pose pas
BREF : c'est la grande énergie ! La France en marche !
Du coup, tu n'en peux plus de stagner, là, à rien faire, à pas bouger !
Alors, tu prends la voiture et tu vas faire un tour à... à... à... Biarritz ! Tiens, voilà ! C'set tout ce que ça mérite !
Faut quand même faire gaffe à l'heure et revenir avant 18 heures avec ce bordel de couvre-feu de merde à la con ! Du coup, tout le monde se retrouve dans les magasins et sur les routes en même temps.
J'arrive à Biarritz.
Tiens, je vais faire des photos du rocher de la Vierge avec des panneaux devant.
BIARRITZ
Rocher du panneau de la Vierge
La légende raconte que les pêcheurs biarrots, baleiniers à l’époque,
furent pris dans une tempête terrible.
Une lumière divine les guida pour rentrer au port. Les rescapés érigèrent en remerciement
une statue de la vierge sur ce rocher.
Putain, mais le danger est partout quoi ?!!!
Je flane un peu autour du rocher en montant ici, en redescendant par là.
Tiens, j'avais jamais fait gaffe à ce trou sur la droite de la passerelle menant au rocher.
C'est ici que le 3 février 2011 les cendres de l'actrice Maria Schneider ont été dispersées. Maria Schneider, on se souvient surtout d'elel pour son rôle de Jeanne dans "Le dernier tangio à Paris" (1972) de Bernardo Bertolucci avec Marlo Brando.
Elle était l'enfant naturelle de Marie-Christine Schneider, mannequin roumain, et de l'acteur Daniel Gélin qui ne pouvait légalement reconnaître puisqu'il était marié avec Danielle Delorme. C'est lui qui, plus tard, lui fera découvrir les milieux du cinéma, en l'emmenant sur des plateaux de tournage.
Sa vie change lorsque Brigitte Bardot la prend sous son aile, en 1969, lors du tournage du film Les Femmes de Jean Aurel où elle est figurante ; puis elle décroche son premier rôle dans "L'arbre de Noël" (1969) de Terence Young.
Oh putain, je me souviens de ce film. Je l'avais vu quand j'étais enfant. Une sorte de traumatisme m'avait envahi ensuite, me faisant penser qu'à chaque fois que quelqu'un était sympathique avec moi, c'est parce que j'allais mourir. Ben ouais, si tu vois le film, tu comprendras.
On pourrait continuer à parler de Maria Schneider, mais vu que sa vie n'a pas toujours été facile, on va plutôt continuer à se promener en pensant à autre chose.
Je surplombe Port-Vieux, Vieux-Port. La plage. Les bars fermés. Les restos aussi. Pas grand monde sur les trottoirs de l'esplanade du Port-Vieux..
Météo pluvieuse. Deux personnes se baignent dans l'anse de la plage. Je me pose face à la Villa Belza complètement retapée.
Elle est toute blanche. "Belza" en basque veut dire "noir".Vide. Elle a perdu de son charme initial, quelque peu fantomatique, énigmatique.
De nombreuses légendes autour de cette maison emblématique. On dit que la nuit les fantômes des morts ayant habité ici rodent, faisant parfois claquer les volets de la demeure faiblement éclairée. Non, ce n'est pas le vent ! Victime de plusieurs incendies, la villa trône sur son rocher mystérieux, battu par les vagues, depuis la fin des années 1800 ; là, juste à côté de ce que l'on appelle "le trou du Diable". Le tumulte de la marée montante, les vagues incessantes venant affronter les rochers.
C'est l'architecte Alphonse Bertrand qui fit construire cette demeure, de 1880 à 1895. Ayant tout d'abord l'apparence d'un chalet auquel furent ajoutés au fil des années qui de un pavillon plus élevé, qui de un donjon néo-médiéval avec tourelle en forme de poivrière. Mais la villa Belza doit son nom à celui de la femme de son premier propriétaire, Marie Belza Dubreuil, épouse d'Ange Dufresnay.
Début des années 1900, la demeure sert de décor cinéma pour divers films. Une notoriété qui lui valut d'être cambriolée de toute son argenterie le printemps suivant. En 1923, Mme Dufresnay loue la maison à Grégoire Beliankine, beau-frère d'Igor Stravinsky. Il en fait un restaurant russe en la renommant le château basque". Diners de gala, fête russe, fête japonaise, fête de Neptune, fête de Bacchus, nuits d’Afrique,... Le restaurant devient cabaret et accueille de nombreuses vedettes au cours de soirées surréalistes, allant des chœurs cosaques au charleston.
Mais le krach boursier de 1929 mettra fin à la belle aventure. Après la guerre, elle est rachetée et divisée en plusieurs appartements. Incendie, revendue, incendie, rachetée. Dans les années 1990, c'est un jeune marchand de biens parisien qui rachète le tout. Réhabilitation, travaux. Les prix au m2 battent tous les records. En 2020, un appartement s'y vends au prix de 40 000 euros le mètre carré.
Voilà sûrement pourquoi la villa a aujourd'hui perdu de son charme originel, de sa beauté mystérieuse et inconnue.
Bon, eh oh, dis ! Il est 17h34 !
Le temps que je rentre, ce sera 18h00.
Fin de journée.
Tshaw !
PS : Le lendemain, en lisant la presse,
je découvrirai que le rocher de la Vierge
est à présent fermé au public...
Même la nature ne veut plus que l'on sorte !