Il y a quelque temps de cela j'ai écrit un billet ayant pour titre "Bordeaux, visite aléatoire, partie 1". Il est grand temps à présent d'écrire la suite qui a pour titre "Bordeaux, visite aléatoire, partie 2". Ben oui, tout simplement.
Quand soudain, ne voilà-t-il pas...
"Bordeaux, visite aléatoire". De prime abord, peut être, as-tu pensé peut être qu'il s'agissait d'une façon de découvrir les vins de Bordeaux sans modération conduisant à un état éthylique aléatoire ? Mais à ce moment là, j'aurais appelé ce billet "Visite aléatoire des vins de Bordeaux". Et si on se mettait à bien analyser cette phrase, on en viendrait de suite à se dire : Mais ça ne veut rien dire ?!
Tout à fait et c'est donc pour cela que "Bordeaux, visite aléatoire" est une visite de la ville de Bordeaux de façon aléatoire ; c'est à dire au pif.
Ah oui, Pif le chien ! On s'en souvient. Enfin, pour ceux qui sont nés avant 1984.
Ce petit chien de bande dessiné est créé en 1948 par José Cabrero Arnal, dessinateur espagnol, pour le quotidien L'Humanité. Arnal était un combattant des milices républicaines, mais lorsque Franco prend le pouvoir en Espagne, il doit se réfugier en France. Interné dans les terribles camps installés sur les plages du littoral méditerranéen, il souhaite continuer le combat et s'opposer aux nazis. Il s'engage alors dans les Compagnies de Travailleurs Étrangers et part pour la ligne Maginot. Après l'offensive allemande et la défaite française, lui et ses compatriotes sont alors capturés et déportés par les nazis à Mauthausen. Il fait partie du train des "Rote Spanier" (Espagnols rouges) qui arrive le 27 janvier 1941. De retour à Paris à la Libération en 1945, il rencontre René Moreu, rédacteur en chef de Vaillant et commence à dessiner pour le journal L'Humanité. C'est le 26 mars 1948 que parait pour la première fois Pif le chien.
En 1969, le magazine Vaillant est remplacé par le seul, l'unique, le merveilleux, l'extraordinaire Pif Gadget.
Quelle belle et incroyable invention que ce Pif Gadget ?! Aaaah, allez, on ne peut résister au fait de citer quelques exemples incroyables de gadgets présentés dans le magazine tout au long de ses nombreuses années de parution.
En avril 1970, le numéro 60 de Pif Gadget, qui contenait les fameux Pifises, a été tiréà 1 000 000 d'exemplaires (650 000 exemplaires, puis retiréà 350 000 exemplaires). En septembre 1971, le numéro 137, qui propose comme gadget les "pois sauteurs du Mexique", est également tiréà 1 000 000 d'exemplaires. Il s'agit dans les deux cas du plus fort tirage en Europe pour un journal de bande dessinée.
Et Pif, c'est également son fils, Pifou,
bien connu pour son vocabulaire extrêmement varié
à base de "Glop" et de "Pas glop".
Tiens, comme ça pour rien, savais-tu que PIF est également le diminutif de la Péritonite Infectieuse Féline, c'est à dire une maladie extrêmement grave atteignant en priorité les jeunes chats. Eh oui !
Bon, pif veut également dire nez en argot et c'est également un mammifère mâle dont un seul testicule est descendu dans le scrotum.
Voilà, voilà...
Mais
qu'est-ce qu'on disait
au départ ?
Ah oui, "Bordeaux, visite aléatoire", c'est à dire "visite au pif", c'est à dire "rien de préparer, juste errer de rues en rues de façon complètement hasardeuse ou presque".
J'ai cherché pendant de longues heures un autre titre pour ce billet, mais finalement comme c'est la suite de l'autre que j'avais écrit il y a maintenant cinq mois, eh hein, bon, on va pas, non plus, parce que, bon, alors, voilà.
Alors : où en étions-nous lors du précédent épisode : Bordeaux, visite aléatoire, partie 1 ?
Nous avons visité le jardin public, le parc bordelais, le CAPC, la place des Quinconces, le Darwin Eco System,...
STOP !
On en était là :
au Darwin Eco System,
un lieu qui se trouve sur la rive droite
ou gauche de la préfecture girondine.
Bon, attends, comment sait-on que c'est la rive droite ou la rive gauche parce que ça, c'est énervant.
Alors : la rive droite à Bordeaux, c'est la partie Est.La rive gauche, la partie... la partie... la partie Ouest !
Oui, bien joué ! Est-Ouest, Ok, tranquille !
Après, il y a aussi l'Entre-deux-mers, et à ce moment là,
nous ne parlons plus architecture,
mais vin avec cette région bordelaise
qui se situe entre la rive droite de la Garonne
et la rive gauche de la Dordogne.
Mais comme on a dit au début que "visite aléatoire de Bordeaux"
n'est pas "visite aléatoire des vins de Bordeaux", ça va pas.
DONC
nous nous sommes quittés au Darwin Eco System.
Je sors du Darwin Eco System pour rejoindre les quais de la Garonne, rive droite... oui, c'est ça, rive droite. En face, c'est la rive gauche. Plus peuplée, plus dense, plus commerçante, plus... comment dire... carrée, droite, hausmanienne ; même si ce n'est pas sous la houlette de ce fonctionnaire parisien que Bordeaux s'est construite.
"Le début de la période moderne coïncide pour la ville de Bordeaux au basculement de la domination anglaise vers la domination française (1453). Bordeaux connaît son second apogée du milieu du XVIIème siècle jusqu'à la Révolution française. Cette prospérité provient à nouveau de son port, qui va devenir le premier port du royaume. (...) La traite des noirs, déjà initiée par les grandes compagnies portugaises ou anglaises notamment, va se développer peu à peu en France. La place privilégiée du port de Bordeaux va susciter la convoitise de riches familles de négociants qui vont vouloir s'enrichir grâce à la traite. Au même titre que Nantes, La Rochelle, Lorient et bien d'autres, Bordeaux devient un centre négrier et permet à certaines grandes familles de négociants de s'enrichir grâce au commerce colonial en droiture.
Pendant cette période de prospérité pour la ville, les archevêques, les intendants et les gouverneurs installés par le roi, embellissent la ville, assèchent les faubourgs marécageux et insalubres et aménagent les anciens remparts. Les intendants Claude Boucher et Louis-Urbain-Aubert de Tourny font, à moindre échelle, ce que fit cent ans plus tard le baron Haussmann à Paris.(...)
L'architecte André Portier construit, à la place des portes fortifiées de la vieille ville, des arcs de triomphe majestueux.(...) La ville se dote également d'un opéra et d'un jardin public.(...)
Gabriel construit aussi la vitrine de la ville : la place de la Bourse, alors appelée place Royale, magnifique ensemble XVIIIème siècle de type versaillais, qui donne sur les quais.(...)" WIKIPEDIA
Mais alors, est-ce qu'il y a autre chose à faire sur la rive droite que regarder la rive gauche ?
Bien sûr, on peut tout d'abord se rendre au Jardin botanique.
Définition ! Un jardin botanique, c'est quoi ? Un jardin botanique, c'est une institution à vocation scientifique et pédagogique, destinéà faire découvrir à tous le monde des plantes, de la biodiversité, de la nature ainsi que la gestion durable des ressources naturelles.
"Le jardin botanique de Bordeaux existe depuis le XVIIème siècle. Autrefois situé sur la rive gauche, il est maintenant rive droite à la Bastide. Ce jardin est composé de 6 paysages différents. Il est représentatif de notre région par sa flore et ses sols. Le jardin aquatique est magnifique, très bien dessiné avec des plantes d’eau et sa collection de nénuphars. De magnifiques serres sont également entretenues pour permettre au public de voir une très belle végétation de type méditerranéenne."QUOI FAIRE A BORDEAUX
Je ne sais pas si cela venait de la chaleur ou quoi, mais je l'ai trouvéétrange et décalé ce jardin botanique.
Certes, il y a quelques plantes, quelques arbres et plans d'eau éparses ainsi qu'une grande étendue de pelouse sur laquelle lorsque je suis passé officiaient des gens déguisés en super-héros... Si, si. Il y avait bien une vingtaine de super-héros qui tentaient de mettre en place une sorte de chorégraphie... J'ai pas tout compris, mais je n'ai pas eu le droit de les prendre en photo. Donc pas de preuve, tu n'es pas obligé de me croire, mais je peux te dire que ces super-héros buvaient du jus d'orange. Je ne suis pas sûr de la véracité de cette information, mais c'est dit.
Enfin, toujours est-il que si tu veux en savoir plus sur ce Jardin Botanique qui est, apparemment, un des lieux incontournable bordelais, tu peux toujours aller lire la fiche Wikipedia bien fournie (Jardin botanique de Bordeaux) ou encore te rendre sur le site officiel du lieu : Jardin botanique de Bordeaux.
Allez, je sors.
Retour sur le quai des Queyris. Au loin, la flèche Saint-Michel capte le regard.
Avec ses 114 mètres de hauteur, c'est la quatrième plus haute flèche de France.. Et là, tu me dis : "Mais qui est la première ?"
Ah, ah, ah ! Bonne question, excellente remarque, très judicieuse. Eh bien, le plus haut clocher de France est... Non, pas Notre-Dame ! Arrêtez avec Notre-Dame et envoyez vos dons pour sa reconstruction bande de mythos avoinés à l'ère médiato-dramatico-évenementiel.
Non, le plus haut clocher-flèche de France est... est... celui de la cathédrale de Notre-Dame de Rouen avec 151 mètres de hauteur ; également troisième plus haute église du monde. Et là, tu me dis : "Mais qui est la première ?"
Ah, ah, ah ! Bonne question, excellente remarque, très judicieuse. Eh bien, la plus haute église du Monde est... est... est la cathédrale d'Ulm, en Allemagne avec 1377 mètres de hauteur... Hein ? Ah non, merde, ça, c'est l'année à laquelle elle a été construite. Elle détient le record de la plus haute flèche d’église du monde, avec 161,53 mètres de haut.
Eh oui, voilà. Alors, peut être que tu te poses une autre question qui serait "Mais est-ce que la plus haute flèche de France a vu la mort de Jeanne d'Arc sur le bûcher ?"
Ah, ah, ah. Dis donc, quelle question perfide un peu sur les bords, hein... Eh bien pourquoi pas se la poser tout de même ?! Et à celle-ci, je te répondrai que non, la plus haute flèche de France n'a pas vu Jeanne mourir sur le bûcher pour deux raisons.
1) La flèche est située à 600 mètres de la place du Vieux-Marché de Rouen où le bûcher avait été installé le 30 mai 1431.
2) Si la flèche a bien étéélevée pour la première fois au XIIème siècle, elle fut malheureusement détruite par la foudre le 15 septembre 1822, puis reconstruite en fonte en 1884.
Ici, à Bordeaux, pas de Jeanne d'Arc, pas de bûcher, mais cette flèche Saint-Michel dominante, surplombant la Garonne et les toits bordelais. Je vais m'en rapprocher, tiens.
Je traverse le square Toussaint Louverture ; du nom de cet homme politique français des Antilles, ancien esclave, qui a joué un rôle historique de premier plan en tant que chef de la Révolution haïtienne en devenant l'une des grandes figures des mouvements anticolonialiste, abolitionniste et d'émancipation des Noirs par ses prises de position, son sens politique et ses combats. Il mourra en captivité en 1803 au château de Joux, dans le Doubs. Je me souviens avoir visité sa cellule lors de mon service militaire à Besançon... Enfin, ce ne sont pas les autorités militaires qui nous avaient amené voir ce monument, mais un pote rencontré lors du service et qui connaissait la guide officielle du château de Joux qui, du coup, nous avait fait faire une visite aléatoire... Tiens... Je ne sais pas ce que j'ai fait des photos de l'intérieur du château. La seule qui me reste est celle-ci, prise de je-ne-sais-où, en argentique.
C'est après ce service militaire de dix mois effectué en 1998-1999 que je me suis dit que quand je serai libéré, je partirai sur les routes de France à la recherche de lieux, d'endroits et d'histoires. Pour cela, j'ai passé les quatre derniers mois à bouquiner dans mon bureau vide plusieurs livres et magazines quelconques.. Eh mais, je suis en train de raconter ma vie, là !?
DONC après être passé par le square Toussaint Louverture, je longe la Garonne jusqu'à la place Stalingrad sur laquelle trône un imposant lion bleu. Si, si. Non, je ne suis pas en train d'halluciner en croyant voir des super-héros qui boivent du jus d'orange en dansant sur la pelouse du jardin botanique ou en voyant un immense lion bleu sur une place urbaine. Tiens, regarde !
Et tout de suite, sans plus attendre : des chiffres !
Hauteur : 6 mètres.
Longueur : 8 mètres.
Largeur : 3 mètres.
La vache, ça tient pas dans mon appart.
Ce "lion bleu", réalisé en polyuréthane, a été mis en place ici en juin 2005. Oeuvre de l'artiste lyonnais Xavier Veilhan, il semble en complet décalage avec l'architecture bordelaise ambiante. Il a été placé ici pour "agrémenter" le parcours du tramway. Aaaaah, ils en sont fiers de leur tramway, les Bordelais ! Ils ne parlent que de ça. Et on a vraiment l'impression qu'avant le tramway, il n'y avait pas de Bordeaux. Il faut dire que la ville a profondément été restructurée par rapport à lui afin de faciliter son passage et ses arrêts. Neuf ans de travaux ! Mais je trouve qu'effectivement, c'est pratique... parfois au risque de rendre la ville un peu trop propre, trop régulée, trop "parfaite", trop orchestrée...
Toutefois cependant pourtant et quand bien même, il ne faut pas que ce tramway nous éloigne d'une autre question fondamentale : Mais qu'a voulu nous dire ou faire Xavier Veilhan avec cette oeuvre de lion bleu ?
"Je voulais quelque chose de totémique, d'immédiatement repérable par les passants, un symbole de fierté et de force, suffisamment grand pour qu’on puisse le voir depuis la rive gauche. Le Lion de Bordeaux sera à la fois dominant et protecteur. La statue sera déréalisée par sa couleur monochrome claire. Le bleu clair que j’ai retenu pour le moment se fondrait avec le ciel et tempérerait le style brutaliste de la sculpture."SUD OUEST
Je quitte la place Stalingrad, appelée ainsi en hommage à la victoire de l'armée soviétique lors de cette bataille qui fut l'une des plus meurtrières de l'histoire pendant la Seconde Guerre Mondiale. 480 000 soldats soviétiques ainsi que 250 000 soldats des forces de l’Axe furent tués sans compter le nombre toujours inconnu de civils tués, ni celui encore plus élevé de blessés. La ville fut pratiquement anéantie, puis reconstruite dès le lendemain de la capitulation nazie. En 1961, dans le cadre de la déstalinisation lancée par Nikita Khrouchtchev, la ville prend le nom de Volgograd. Mais il existe toujours dans le monde, et à Bordeaux, des places portant le nom de Stalingrad.
Oui, ben écoute, j'ai envie de mettre de l'histoire sur chaque noms de places ou de rue croisés durant ce périple aléatoire. Nous passons ainsi allègrement des Antilles avec Toussaint Louverture au front russe
Je me lance à nouveau sur le pont de pierre pour rejoindre la rive gauche. Les lampadaires sont très beaux.
Pont de pierre, du nom de la pierre du nom du matériau de construction constitué de roche. Pas de rapport avec un pierre quelconque, comme Pierre Douglas, ou Pierre Desproges, ou Pierre Brasseur, ou Pierre Boulez, ou Pierre Bellemare, ou Pierre Bonte, ou Pierre Vassiliu, ou Pierre Bérégovoy, ou Pierre Soulages, ou Pierre Brossolette, ou Pierre Richard, ou Pierre Paul Rubens, ou Pierre Mondy, ou Pierre Mendès-France, ou Pierre Mondy, ou Pierre Fresnay, ou Pierre Larousse, ou Pierre Laval... Ah non, pas Pierre Laval. Tiens, d'ailleurs, il n'y a plus trop de rues Pierre Laval, ou de Rue Philippe Pétain, ou rue Henri Bousquet, ou rue Maurice Papon, ou rue Paul Belmondo en France de nos jours...
Ce pont de pierre n'est pas non plus
un hommage au film "RRRrrrr" d'Alain Chabat...
Construit sur l'odre de Napoléon 1er entre 1810 et 1822, 4 000 ouvriers travaillèrent à son édification. Plus de chiffres ? Fastoche !
D'une longueur de 487 mètres, l'ouvrage présente 17 arches construites sur 16 piles. Ce fut un véritable progrès pour la ville car l'ouvrage a permis de relier le centre ville au quartier de la Bastide dans le but d'étendre et implanter de nouvelles installations portuaires.. Depuis l'Antiquité, Bordeaux se heurtait à l'infranchissable Garonne, animée par le flux et le reflux des marées et sujette à des crues violentes. Pour pénétrer dans la ville les voyageurs devaient traverser le fleuve sur des bacs.
Du pont, on a également une belle vue sur les quais de la rive gauche au loin avec la place de la Bourse, la place des Quinconces, les flèches de l'église Saint-Pierre et les différentes façades d'immeubles de bord de Garonne.
La disposition de la ville, au creux de ce méandre de la Garonne, lui a valu le surnom de "port de la lune".
Le centre historique avec les places de la Comédie, de la Bourse et des Quinconces contribuent à aérer le coeur de la cité. Devenu trop petit compte tenu de la population croissante, ce centre s'est adjoint un quartier d'échoppes. Au-delà des boulevards, une banlieue formée de trois couronnes ceinture la ville : une première assez ancienne et dense ; une seconde, industrielle construite dans les années 1960 ; puis une dernière, péri-urbaine et plus clairsemée.
Une fois le pont traversé, je prends la direction de la basilique Saint-Michel. Eh oui, c'était l'un des buts aléatoires de cette traversée : aller voir cette haute flèche.
Cela fait maintenant quelques kilomètres qu'elle me fait de l'oeil et je n'ai pas l'impression de m'approcher pour autant. Elle semble voler au-dessus des toits, ou peut être s'éloigner un peu plus à chaque fois que je m'approche. C'est finalement un peu comme une randonnée en montagne lorsque tu aperçois le sommet d'un pic, que tu évolues, que tu marches, que tu sembles enfin t'en approcher et que, finalement, il y a toujours une butte, un mont, une colline encore à franchir. Bordeaux, montagne urbaine ? Non, elle n'est qu'à 16 mètres d'altitude par rapport au niveau de la mer... ou de l'océan.
Je passe la Porte de Bourgogne, virage à gauche, rue Maubec et arrivée sur le parvis de la basilique aménagé pour s'appeler maintenant la place Meynard. Là, voilà, je suis au plus près de cette immense tour qui n'est pourtant, rappelons-le, que la quatrième plus haute flèche de France.
C'est aussi sur cette place que se tient chaque samedi un marché de plein air et lorsque je suis arrivé, tout le monde remballait. Cagettes, papiers, camion,s fruits et légumes à terre. Fin de marché quoi. Mais pas possible de prendre une photo de la place. "C'est donc la mort dans l'âme" -comme le disait si bien Jean-Claude Camus lors de l'annulation du concert de Johnny Hallyday au Stade de France en 1998- que j'ai du me résigner à prendre des photos de cet endroit, apparemment si sympathique au demeurant, et bien vivant.
Nous ne nous satisferons alors que d'une capture d'écran faite sur le Google view de Google map... Tiens, à Bordeaux, je n'ai pas non plus vu de Rue Google, ou de rue Yahoo, ou Rue Facebook, ou rue Instagram...
Bon, ce n'est peut être pas la meilleure capture que j'ai faite... En même temps, on voit bien que cette place est ombragée et donc plutôt agréable quand il y a du soleil. Autre caractéristique de cette capture, c'est le seul endroit de tout Bordeaux où on ne voit pas la flèche Saint-Michel qui, rappelons-le, est la... la... la... J'attends... La... La... quatrième plus haute flèche de France ! Oui, bravo, tout le monde suit !!! Intéressons-nous alors à cette place dont je n'ai pas trouvé l'origine du nom. La seule chose que j'ai trouvée, c'est que la place Meynard se prolonge jusqu'à la place Canteloup... Oui, oui, on pense peut être à la même personne, mais là aussi je n'ai trouvé aucune explication et aucun historique.
ALLEZ,
PLACE MEYNARD ALORS !!!
Aménagée au XIXème siècle, elle était au préalable un cimetière paroissiale. On y a trouvé des momies qui furent exposées un temps dans la crypte de la base de la flèche de la basilique. Intrigantes momies qui ont captivé l'attention de grands écrivains de passage à Bordeaux, comme Gustave Flaubert et Victor Hugo.
"(...)"J’avoue que je me suis assez diverti à contempler les grimaces de tous ces cadavres de diverses grandeurs, dont les uns ont l’air de pleurer, les autres de sourire, tous d’être éveillés et de vous regarder comme vous les regardez" confie le jeune Flaubert après une visite.
Mais c’est Victor Hugo qui leur assure une célébrité nationale lors de sa visite en 1843: "Imaginez un cercle de visages effrayants au centre duquel j’étais. Les corps noirâtres et nus s’enfonçaient et se perdaient dans la nuit. Mais je voyais une foule de têtes sinistres et terribles qui semblaient m’appeler avec des bouches toutes grandes ouvertes, mais sans voix, et qui me regardaient avec des orbites sans yeux"écrit-il dans son récit de voyage entre Bordeaux et Biarritz.(...)"SAINT MICH
Le mystère demeure aujourd'hui : où se trouvent les momies ?
"(...)En 1979, la crypte est fermée, officiellement à cause de leur dégradation. Les momies sont transférées au cimetière de la Chartreuse, après décision en conseil municipal. "Avec le temps, elles commençaient vraiment àêtre dans un mauvais état. Et je me souviens que certains touristes volaient des bouts de peau", explique Colette Lestage. "La dernière guide qui organisait les visites était une vieille dame espagnole du quartier Saint-Michel. Les corps partaient en lambeaux, elle était obligée de les rafistoler avec du fil barbelé", ajoute Yves Simone. Jean-Luc Chadouteau, agent de conservation au cimetière de la Chartreuse, a une autre version : "Elles ont surtout été déplacées parce que des personnes menaçaient de les profaner. Il y a eu des cas de soirées gothiques où des jeunes cassaient les portes pour procéder à des rites au milieu des momies. Histoire de se faire peur".
Même sur cette question, la vérité ne semble pas encore trouvée. Aujourd’hui, les momies se trouvent dans un reliquaire dépendant de l’ossuaire général n°3 du grand cimetière bordelais. Perdues dans l’anonymat, elles côtoient les ossements de centaines d’autres corps, eux aussi anonymes."Ici, personne ne les demande", avoue un agent municipal chargé du cimetière. Loin de Saint-Michel, les momies ont peut-être enfin trouvé le repos.(...)"SAINT MICH
La place Meynard est aujourd'hui une belle place aérée avec quelques arbres et terrasses de café au soleil. La basilique, elle, est séparée en deux. Le clocher de 114 mètres et sa crypte sont indépendants du sanctuaire.
Il est possible de visiter la crypte et de monter dans la flèche pour 5 euros du 1er avril au 31 octobre. L'ascension de la flèche se passe en deux temps. Tout d'abord, on accède au premier étage à 23 mètres de haut d'où l'on peut apprécier déjà un beau panorama sur la ville et ses alentours. Il y a possibilité de s'arrêter pour admirer les sept cloches en volée, puis les quinze cloches fixes avant de rejoindre le clocher, appelé seconde terrasse, culminant à 47 mètres de hauteur... Oui, OK, c'est vrai : on est loin des 114 mètres de la flèche, mais la vue est, parait-il, extraordinaire. Je dis "parait-il" parce que je n'y suis pas allé. Je me suis juste contenté d'entrer dans le sanctuaire pour trouver un peu de fraicheur avec une chanson de Billy Idol en boucle dans le crane.
Chose étrange puisque, comme beaucoup le savent, "Flesh" en anglais
ne veut absolument pas dire "Flèche" en français.
BASILIQUE SAINT MICHEL
Bâtie du XIVème au XVIème siècle, elle est caractéristique du style gothique flamboyant. L'église a donné son nom au quartier dans lequel elle se situe. A l'époque, il s'agit du quartier des marchands et artisans, tels que carpenteyres (charpentiers) ou fustiers (tonneliers). Très vite, la basilique devient une étape pour les pèlerins de Saint-Jacques-de-Compostelle, mais elle souffre des conséquences du tremblement de terre qui frappe Bordeaux le 10 août 1759. Frappée à plusieurs reprises par la foudre, faute de paratonnerre, la flèche du campanile est emportée par un ouragan en septembre 1768, ramenant sa hauteur à'seulement' 99 mètres.
Bon, je sais pas... Euh... quoi dire ?
L'orgue trônant au-dessus de l'allée centrale est beau et impressionnant.
"Le buffet d'orgue, de style Louis XV, est construit de 1762 à 1765 par Cessy et Audebert. Les grandes-orgues, œuvres de l'organier Micot, ont été restaurées à plusieurs reprises, et notamment reconstruites par Joseph Merklin en 1865. Elles comptent 41 jeux pour trois claviers et un pédalier." WIKIPEDIA
Ce qui m'a le plus interpellé, ce sont les reflets colorés des vitraux sur les murs.
Ces vitraux datent pour l'essentiel des XVIème siècle, XIXème et XXème siècles. Parmi les plus anciens notons ainsi un "arbre de Jessé" où dominent les tons rouges, jaunes et bleus. Les vitraux du chœur, dus à l'artiste Max Ingrand, remplacent des verrières du XIXème siècle détruites par les bombardements.
Dans la première chapelle du bas-côté droit, la statue de sainte Ursule abrite mille vierges sous son manteau.
Alors, bien sûr, après cette non-visite de la flèche de la basilique Saint-Michel, on pourrait se demander ce qu'est devenu Billy Idol et sa lèvre relevée après ce terrible accident de moto en 1990 et qui lui a empêché de tenir le rôle du terrifiant T1000 dans Terminator 2 de James Cameron, mais nous n'avons pas le temps car, déjà, après seulement quelques mètres de marche, nous voici au...
Oui, je sais : la photo est nulle, mais le marchéétait en train de fermer quand je suis arrivé. Malgré cette heure tardive, on sent que c'est un lieu plein de vie et de rencontres. des comptoirs côtoient les étales de poissons, viandes, de légumes, de fruits et autres produits locaux. 81 commerçants se partagent l'endroit pour donner l'ambiance au plus grand marché bordelais également nommé"le ventre de Bordeaux".
Le premier marché a vu le jour le 2 octobre 1749. Son nom provient de la Congrégation de religieux mendiants fondée en 1525 à Spolète en Italie, et rattachée à l'ordre de Saint-François. Dès leur arrivée à Bordeaux, les Capucins ont pour but d'évangéliser et transformer ce quartier de débauche en jardins et terrasses.
C'est surtout avec la Révolution, à partir de 1797, que le marché va s'imposer, de la vente de bétail aux artisans, puis la venue des premières familles de commerce (herboristes, cordonniers, couvreurs, drapiers, charpentiers, forgerons). En 1863, la ville de Bordeaux décide d'installer des halles couvrantes qui ne verront le jour qu'en 1881 après que la ville ait racheté des restes de structures métalliques de l'Exposition Universelle de Paris en 1878. (Cf :Marché des Capucins).
Ici, comme dans certains quartiers populaires de la ville, on parlait/parle le Bordeluche. Issu du gascon, il s'est enrichi sur le marché des Capucins au contact des "étrangers" venus du Périgord, de l'Agenais, du Médoc , de la Chalosse et d'Espagne. C'est un parler vrai et affectif, composé de mots simples évoquant la vie de tous les jours.
Par exemple, une mounaque est une poupée, et par extansion une femme quelconque. Grigoner signifie nettoyer, se harter se goinfrer. Une escarougnasse est une égratignure alors qu'une boufiole est une piqûre d'insecte. Être dromillous, c'est être mal réveillé et quand ça fouane, c'est que ça pue. Une bernique est une femme maniaque du ménage et une gigasse une grande femme. Un sangougnas est un homme sans goût alors qu'un quintous est un coléreux et s'il est pignassous, c'est qu'il est fâché. Avoir les monges, c'est avoir peur et quand ça te daille, c'est que ça te fait chier. Ohlala se dit Anqui ; à ne pas confondre avec Enqui qui veut dire enculé ! Le pain au chocolat est une chocolatine. Ah, ah, ah, le fameux débat : pain au chocolat-chocolatine.
Je traverse les halles du marché pour ensuite me promener dans le quartier des Capucins. J'aime beaucoup. Il y a du mouvement, des gens divers. Cela change du côté pince-cul de Bordeaux avec ces longues avenues et ces hauts immeubles type Haussmaniens. Je me dirige un peu au hasard en direction de l'Ouest. Je ne sais pas trop pourquoi. Je suis cette rue animée et populaire qu'est la rue Elie Gintrac, du nom d'un grand médecin bordelais du XIXème siècle. Auparavant, cette rue s'appelait rue des Incurables. Elle permet toujours de relier le marché des Capucins à la place de la Victoire ; sorte de pôle où se croisent étudiants, employés et touristes.
On la reconnaît à sa porte d'Aquitaine située en plein centre de la place et à la présence de nombreux restaurants-bars, snacks. c'est encore là un centre névralgique de la ville de part sa position géographique. Le marché des Capucins (oui, je l'ai déjà dit, je sais) et le cours de la Marne venant de la gare à l'Est, les cours de l'Argonne et de la Somme au Sud s'orientant vers les grands boulevards, le cours de la Libération menant au quartier Mériadeck à l'Ouest et, bien sûr, la bruyante rue Sainte-Catherine au Nord déboulant tout droit sur la place après avoir exposé son 1,2 kilomètre de boutiques, faisant d'elle l'une des plus importantes rues piétonnes d'Europe.
Eh bien, ce n'est pas vers elle que je me dirige. Oh que non ! Trop de monde, trop de mouvements ! Trop de bruits, trop de trucs !
Je contourne l'une des deux sculptures du Tchèque Ivan Theimer,
posée ici le 17 juin 2005...
Ah oui, elle est impressionnante. En fait, on ne dirait pas comme ça, mais elle est plus haute que la flèche de la basilique Saint Michel puisqu'elle mesure plus de 115 mètres de hauteur. Non, bon, je déconne. Il y a en fait deux tourtues de bronze. Elles mesurent chacune 5à centimètres de hauteur et sont inoffensives. Pour obtenir cette belle vue en contre plongée des tortues, il ne faut pas hésiter à se coucher par terre pour les photographier ; tout cela sous les regards des touristes et des passants désabusés.
Maintenant, tu as peut être envie de poser LA question importante du lieu et qui serait : "Mais que foutent ces tortues ici, en plein centre-ville ?"
Eh bien, j'ai trouvé une explication en surfant sur internet et je peux te dire un truc, c'est qu'elle ne m'a pas convaincu DONC je n'en parlerai pas ici.
Je me dirige vers le quartier de la Grosse Cloche.
Pour cela, j'emprunte la rue Paul Broca, du nom de ce médecin, anatomiste et anthropologue français (1824-1880), dont la mère Annette Thomas était la fille d'un pasteur protestant, maire de Bordeaux sous la Révolution. On doit à Broca d'intenses recherches sur le cerveau humain ainsi que la découverte d'une zone du cerveau appelée depuis l'aire de Broca, associée à la production des mots parlés alors qu'une zone différente du cerveau, l'aire de Wernicke, est associée à la compréhension de ces mots. Ben oui ! Il mourra subitement d'une rupture d'anévrisme, âgé seulement de 56 ans.
HOP : je tourne à gauche, rue Gratiolet, autre grand nom de la recherche sur le fonctionnement du cerveau, mais on ne va pas non plus s'étendre à chaque fois que l'on traverse une rue. Toujours est-il que contrairement à Paul Broca, Louis-Pierre Gratiolet refusait tout lien entre l'intelligence et la taille du cerveau.
je passe devant la chapelle des Spiritains, puis, à hauteur du magasin Steack-fripes, j'entre dans la rue du Mirail pour descendre jusqu'à la Grosse Cloche par la rue Saint James.
Alors, pourquoi la Grosse Cloche ?
Eh bien tout simplement parce qu'il y a une grosse cloche... là, dans le beffroi de l'ancien hôtel de ville. C'est un des rares monuments datant du Moyen-Age que la ville a conservé. Les Bordelais y sont très attachés ; à tel point que quand le roi voulait punir les Bordelais, il faisait enlever la cloche et l'horloge.
Cette cloche était là pour donner le signal des vendanges et alerter la population en cas de débuts d'incendies, véritable symbole figurant encore aujourd'hui sur les armoiries de la cité. Présente ici depuis le XIIIème siècle, la cloche actuelle n'est pas celle d'origine. Cinq autres se sont succédées à cette place. Celle en présence a été fondue en juin 1775 par le fondeur Turmeau et porte le doux nom d'Armanda-Louise. Elle pèse 7 800 kg pour deux mètres de hauteur et de diamètre. En raison de ce poids et des risques de fissures que pourraient provoquer les vibrations de la cloche, elle ne sonne aujourd'hui que six fois par an lors des grandes célébrations ainsi qie chaque premier dimanche du mois, à midi. Sur sa face intérieure, on peut lire l'inscription en latin suivante :
"Mes coups marquent le temps, ma voix appelle aux armes, j'annonce les jours, je donne les heures, je chasse l'orage, je sonne les fêtes, je crie à l'incendie. J’ai des chants pour tous les bonheurs, pour tous les morts j’ai des larmes"
Je passe sous le beffroi, poursuivant la rue Saint-James (Saint-Jacques en gascon puisque les pèlerins allant à Compostelle passaient également sous cette porte). Un peu plus bas, sur ma gauche, je vois un petit attroupement. Curieux, je m'engouffre dans la rue en question, la rue Pierre de Coubertin car, comme il le disait lui même, l'important n'est pas de gagner mais d'y aller... ou un truc dans le genre.
Au bout de la petite rue, je trouve une boutique avec un panneau : "Le comptoir des chats".
Je continue, toujours au hasard des rues. Mon errance me fait passer dans une belle rue pavée dépaysante, la rue Sainte Colombe.
Une belle devanture de magasin dédiée à la pêche.
Dans cette même rue, des restaurants, bars et pubs ont posé sur les trottoirs leurs tables rondes et tabourets dans un cadre sympathique.
Je continue vers le Nord par les rues Buhan, puis des Bahutiers pour arriver à la rue du Cerf-volant, non loin de l'étroite rue Corcelle.
Des fois, tu te promènes comme ça, là, et tu te demandes pourquoi telle rue a tel nom. Pourquoi la rue du Cerf-volant se nomme-t-elle ainsi ? Eh bien, j'en sais rien ! J'ai cherché, mais je n'ai rien trouvé. Aujourd'hui, dans cette petite rue de 50 mètres, on trouve un commissariat, deux restaurants, une pizzeria, un cabinet de voyance, deux bars, un tailleur de pierres. Mais pas de fabricant de cerf-volant ! J'ai continuéà chercher en mettant dans des mots code sur le moteur de recherche du navigateur internet et, en fin de compte, je n'ai trouvé qu'un article d'octobre 2015 du Sud-Ouest sur Didier Vialard, un Créonais qui pêche au cerf-volant sur la plage du Porge, entre le bassin d'Arcachon et Lacanau.
Je vais te dire un truc que je n'ai jamais dit à personne, mais... je me suis toujours demandéà quoi cela pouvait servir un cerf-volant.
C'est vrai quoi, tu vois les gens avec leur ficelle et leur bout de plastique ou de papier ou de tissus en l'air au bout, là, comme ça, au vent.
Mais à quoi ça sert ? "C'est un loisir", me diras-tu. Oui, c'est vrai. Je me souviens être passéà Hourtin-Plage un peu par hasard où, ce jour là, avait lieu la fête du cerf-volant. C'était très beau et il y en avait de toute taille et pour tous les goûts.
Pourtant, à ses débuts, il semblait possible d'utiliser le cerf-volant à d'autres fins. Né il y a un peu plus de 3000 ans en Extrême-Orient -c'était un mardi-, le cerf-volant était étroitement liéà la religion et à la mythologie. Il servait à attirer l'attention des esprits et avait souvent l'apparence d'un oiseau.
Plusieurs récits légendaires chinois et japonais mentionnent des cerfs-volants porteurs d'hommes. Marco Polo rapporte comment les Chinois étaient capables de faire des cerfs-volants assez grands pour emporter un homme. Avant même le premier millénaire, on savait construire en Chine des cerfs-volants assez grands pour soulever un passager ; le premier homme à effectuer un vol ascensionnel l'a fait à bord d'un cerf-volant (ou bien suspendu en dessous) longtemps avant l'invention de la montgolfière. En Thaïlande, au XVIIIème siècle, le cerf-volant du roi Narai restait en l'air toutes les nuits au moment du changement de mousson, phénomène associé aux fonctions cosmiques du souverain. D'ailleurs, une fois arrivé en Occident, l'homme occidental n'a pu s'empêcher de trouver une utilitéà cet objet : vol humain, photographie aérienne, météorologie, sauvetage en mer, transmission radio, tractation de véhicules et d'embarcation. Par exemple, au XVIIIème siècle, l'Ecossais Alexander Wilson mesura la variation de la température de l'air en fonction de l'altitude à l'aide de thermomètres fixés à six cerfs-volants répartis sur une hauteur de 900 mètres. Plus connu peut être, le 15 juin 1752 près de l'église épiscopale de Philadelphie, Benjamin Franklin qui démontra que les éclairs étaient un phénomène électrique, et non d'origine divine, en lançant un cerf-volant en plein orage. C'est ainsi qu'il inventa le paratonnerre.
BON BREF : ohla, on est allé loin là ! Revenons à notre rue du Cerf-volant où se trouve également (comme tu peux le voir sur la photo ci-haut, à gauche), le bar intrigant "Le cancan, coquetel et flonflon" qui nous accueille avec ces quelques mots :
"Coquetel : [ kok'tèl ] masc. cocktail serait une déformation du mot "coquetier", dans lequel un Français servait de curieuses boissons mélangées appelées "coquetel", à moins qu'il ne s'agisse d'un pharmacien de la Nouvelle-Orléans..."
Flonflon : [ flS.flS ] masc.
"Accords bruyants qui terminent certains morceaux de musique populaire."
Voilà. Allez, je continue. Pas grand chose à dire sur la rue Corcelle où il n'y a aucun commerce ; ce qui est plutôt rare à Bordeaux. J'entre dans la rue du Loup... Aaaah, encore une rue au nom intrigant et la question se pose de suite : pourquoi ?
Là, il y a des explications et des recherches. Pour se mettre dans l'ambiance, rappelons qu'au Moyen Age, la seule pensée du loup terrifiait la population. Bête féroce, monstre errant, accolite du diable, pacte avec les sorcières qui le chevauchait pour se rendre au sabbat... Lors des grandes famines, le loup entrait dans les villes et villages. On le disait "mangeur d'homme et surtout d'enfants pour leur chair plus tendre.Dans les rues bordelaises, on parlait de la présence "d’un loup colossal au pelage gris, presque blanc, qui avait mangé deux enfants, dévoré le bras d’une femme, étranglé tous les chiens de garde du pays et qui pénétrait sans peur dans les enclos pour venir flairer sous les portes".
Voyons ce qui est dit sur l'origine du nom de cette rue présente depuis le XVème siècle sur le site BORDEAUX GAZETTE.
"(...)Dans ses ouvrages sur Bordeaux au XVIème siècle, Elie Vinet pense que ce nom de « rue du Loup » pourrait avoir été donné en hommage à un Biturige Vivisque nommé Lucius Lupus.
Selon Gabriel de Lurbe, procureur-syndic de la Jurade qui publia en 1594 La Chronique Bourdelaise, la rue du Loup évoquerait l’incursion spectaculaire des loups à Bordeaux en 582 :" Les loups en plein midi étant entrés en la ville de Bourdeaus, dévorent à la vue du peuple les chiens en pleine rue et de là Bordeaus fut dite ville des loups. Et il y’a encore pour aujourd’hui une rue appelée rue du Loup".
Le chroniqueur Pierre Bernadau n’est pas d’accord et affirme que le nom de la rue n’est pas antérieur au XVème siècle ; selon lui il y’avait dans cette rue de nombreux pelletiers et l’un de ces marchands avait comme enseigne un vieux loup empaillé d’où le nom de la rue.(...)"Dominique Mirassou
La rue du Loup se termine à l'ouest en se jetant sur la place Pey Berland dominée dans un premier temps par la tour Pey Berland.
PLACE PEY BERLAND
TOUR PEY BERLAND
Attention, ici, nous ne sommes pas à Bordeaux, nous ne sommes pas dans le centre : nous sommes dans l'hypercentre bordelais ; c'est à dire au plus près du centre et même un peu plus. L'hypercentre, c'est vraiment le centre du centre, tu vois. D'ailleurs, 14 rues permettent d'accéder à cette place Pey Berland.
Alors, bon, une fois que ça c'est dit, maintenant, on est en droit de se demander : mais que fait cette tour là, ici, sur cette place hypercentrée ?
Eh bien, tout d'abord, la tour Pey Berland est l'un des monuments les plus visités de Bordeaux. Elle a étéérigée entre 1440 et 1446 et elle est surmontée par une statue dorée représentant Notre Dame d'Aquitaine portant un enfant. Celle-ci est tournée vers le village de Saint Raphaël, situé dans le Médoc, d'oùétait originaire Pey Berland, archevêque de Bordeaux de 1430 à 1456.
Tout comme la flèche Saint-Michel est isolée de la basilique, la tour aussi conserve son indépendance par rapport à la cathédrale Saint-André située juste à côté. Quelle est cette manie bordelaise d'isoler les tours des édifices religieux ? Eh bien, comme souvent, il y a une explication.
"La situation isolée de cette 'tour-clocher' n'a rien de bien étonnant en Gironde, où les exemples sont légion. En particulier du fait des vibrations des cloches et du sol marécageux, qui auraient pu fragiliser la cathédrale. Cependant, il faut rappeler que la tour était autrefois reliée à la cathédrale par les maisons des chanoines, selon une coutume en vigueur dans tout l'Ouest de la France."WIKIPEDIA
Culminant à une hauteur de 66 mètres, le dernier étage permet de dominer la ville et de s'offrir un point de vue unique sur Bordeaux. Il faut toutefois le mériter et ne pas avoir peur de gravir 231 marches pour atteindre la terrasse (à 55 m de hauteur) qui a la forme d'une galerie autour de la flèche.
Mais la place Pey Berland, c'est aussi la cathédrale Saint-André.
Beau monument, bel édifice, très propre. Quelques histoires et rencontres durant les siècles passés.
"Ses murs ont vu en 1137 le mariage d’Aliénor d’Aquitaine et de Louis VII, le futur roi de France puis cinq siècles après, l’union d’Anne d’Autriche et Louis XIII. Au moment de la Révolution elle deviendra un magasin à fourrage… triste destinée pour ce monument qui eut à subir un incendie dévastateur au XIXe siècle. Si bien que son mobilier fut reconstitué avec les dépouilles d’autres églises."BORDEAUX TOURISME
En 1789, les biens des églises sont mis à disposition de la Nation pour garantir les dettes du nouvel état révolutionnaire. La cathédrale Saint-André est ainsi "vidée" de la quasi-totalité de ses richesses. S'en suivra une période chaotique où elle servira tour à tour de salle polyvalente, de magasin de fourrage, de temple de la Raison ou de halle pour des fêtes patriotiques.
Malgré ce passé, il y a encore beaucoup de choses à voir dans cette cathédrale : le portail royal et ses sculptures colorées, la nef romane, un choeur gothique, des peintures murales funéraires, des albâtres de Nottingham, des bas-reliefs, une crucifixion du peintre flamand Jacob Jordaens, des grilles du XVIIIe siècle, les grandes orgues et...et...et le Trésor de la cathédrale.
"Ce n'est qu'en 1947 que le siège épiscopale recouvrira un trésor grâce à un bordelais montéà Paris pour devenir curé : Barthélémy Marcadé. Également amateur d'art, il fut un grand chineur devant l'Éternel, constituant pendant une cinquantaine d'années une collection de tableaux, statues, objets, vêtements liturgiques, enluminures datant des XIVe, XVe, XVIe et XVIIe siècles. De retour au pays pour ses derniers jours, il en fit don à l'État qui la présenta en la cathédrale. C'est le trésor aujourd'hui ouvert à la visite."BORDEAUX TOURISME
Tout ceci a l'air très beau et intéressant, mais je ne suis pas allé voir.
Mais la place Pey Berland, c'est aussi la statue de Jacques Chaban-Delmas !
"Maire de la ville de Bordeaux de 1947 à 1995 En 2006, la Ville commandait une statue de bronze en souvenir de Jacques Chaban-Delmas au sculpteur Jean Cardot, membre de l’Académie des Beaux-Arts et auteur, entre autres, de la statue de Charles de Gaulle du rond point des Champs Elysées à Paris et de celle de Winston Churchill située devant le Petit Palais. Érigé place Pey-Berland, près de la place Jean Moulin, ce monument a été dévoilé le 12 novembre 2012 à 12h00. Jacques Chaban-Delmas y apparaît en pied, marchant en direction de l'hôtel de ville qu'il a occupé pendant 48 ans."MONUMENT TRAKER
Je ne sais pas pourquoi je ne l'ai pas prise en photo. Par contre, je me souviens qu'un soir de février 2017, les Bordelais avaient été surpris de retrouver un canapé enfoncé sur la tête de la statue qui mesure tout de même quelques 3,2 mètres.
STATUE DE JACQUES CHABAN-DELMAS
Photos : Sud-Ouest
Mais la place Pey Berland, c'est aussi la mairie de Bordeaux.
A l'origine "Palais Rohan"édifié en 1771 pour l’archevêque de Bordeaux Ferdinand Maximilien Mériadec de Rohan, ce monument a porté plusieurs noms au fil des siècles : Hôtel de l'archevêché jusqu’à la Révolution, hôtel du département puis siège du tribunal révolutionnaire en 1791, hôtel de la préfecture en 1802, palais impérial de Napoléon 1er en 1808 et château royal en 1815 sous Louis XVIII, le palais Rohan devient hôtel de ville en 1835.
Ainsi, par la présence de tous ces monuments et par ce remodelage géographique entrepris pour le passage des lignes du tramway, on peut dire que oui la place Pey Berland est bel et bien l'hypercentre de Bordeaux. Continuons un peu plus loin.
Et nous n'allons pas aller bien loin puisqu'à quelques 300 mètres au nord, c'est le Musée des Arts déco et du Design qui nous attend au 39 de la rue Bouffard.
DANS NOTRE PROCHAIN ÉPISODE
Nous continuerons notre errance aléatoire dans les rues bordelaises au hasard des rues, des monuments et des rencontres.