Alors, je ne sais pas si tu te souviens, mais la dernière fois que j'ai posé le titre "Cambo-les-Bains, la chapelle aux Icônes", eh ben, finalement, euh, je n'y étais pas arrivé. Non pas parce que la nuit était soudainement tombée, ou que la chapelle avait disparu, mais tout simplement parce que j'avais passé plus de temps que prévu sur la route, entre Mouguerre et cette ville thermale qu'est Cambo-les-Bains.
Quand soudain, ne voilà-t-il pas...
Ecoute eh hein : il y a des priorités dans la vie ! Et quand on a une belle lumière et de somptueux paysages, la priorité, c'est de prendre son temps, se poser et contempler.
Et ces Pyrénées là qui sortent de terre en exhibant leur blancheur neigeuse ! Et ces champs en pente à la verdure basque profonde ! Comment veux-tu, mais oui : comment veux-tu ne pas t'arrêter pour regarder, contempler, respirer, photographier !? Et pour les jeunes d'entre toi -lectrices, lecteurs- ne trouves-tu pas ces paysages complètement instagrammable s'il n'y a plus que cela qui compte pour toi ? Hein ? Hein ? Bon, allez, on reprend où nous en étions lors du précédent épisode.
Lors de l'épisode précédent (cf : Cambo-les-Bains, la chapelle aux Icônes, sur la route), nous avons tracé la route. Ouais !! Comme le chantait Maxime Le Forestier. Ah non, je confonds avec"Passer ma route".
Je suis tranquillement en train de déambuler sur les routes du pays basque, sans réseau, sans contact, alors que partout ailleurs, l'info prime, l'info domine, l'info nous culpabilise, l'info répétitive, l'info à outrance,...
Dans les journaux télé-écrits-radio, ils n'ont jamais été aussi rébarbatifs, répétitifs, cyclique, récurrent, itératif... Oula, j'aime bien ce mot "Itératif". Définition.
ITERATIF : Qui est fait ou répété plusieurs fois.
Il y a cette sorte de léthargie qui donne envie d'éteindre la radio, les télés... mais, malheureusement, le prix des carburants a augmenté et dès que nous faisons trois kilomètres, cela représente l'équivalent d'une semaine de nourriture pour une famille de quatre personnes. Un nouveau confinement ?
Après le confinement forcé du à un virus, nous voici "obligés" de rester chez nous, faute de revenus financiers suffisants pour nous déplacer. Une attestation pour les revenus modestes ?
Ah pardon,
un flash info express !
Ouais, bon, ça te fait rêver ça ? Hein ? Non, mais franchement ! Mais non ! Hein ?!
Bien sûr, on préfère rester peinard et aller à Cambo-les-Bains visiter cette incroyable chapelle aux Icônes ! Mais oui ! Restons humbles ! Et gardons espoir !
Oui : gardons espoir : il y a toujours une vie après le sac mortuaire !
DONC : on en était où là ?
"Pays basque c'est beau", "La brume, c'est chouette". Ok, bien.
Et ne voilà-t-il pas que nous arrivons à Cambo-les-Bains. Comme ça, d'un coup !
Cambo-les-Bains : Nive, maison blanche et Mondarrain
Le Mondarrain, c'est cette belle colline colorée, baignée par les rayons d'un soleil passager.
Son sommet atteint 750 mètres et son nom viendrait de Arrain ; contraction de arri-gain qui signifie "haut rocheux" en basque.
Une légende court sur elle.
"Selon la légende, des laminak vivaient au plus haut de la montagne. Tous les matins, avant le lever du soleil, Basanderea ou la Dame Sauvage allait sur la crête du Mondarrain se peigner avec un peigne en or. Visible par les bergers, un jour, l'un d'eux déroba le peigne d'or de Basanderea et prit la fuite. S'étant mise à la poursuite de ce dernier, elle dut abandonner la course-poursuite dès que les premiers rayons du soleil apparurent. Elle rentra aussitôt dans son antre et le berger demeura en possession du peigne d'or."
Hein ? Ah ? Pardon.
On me fait signe dans l'oreillette que la colline qui domine Cambo-les-Bains à l'Est n'est pas le Mondarrain, mais le Mont Ursuya.
Son sommet culmine à une hauteur de 681 mètres.
Voilà, voilà. Bon... Continuons.
Cambo-les-Bains, boulevard des Terrasses
En arpentant le boulevard des Terrasses, on découvre une belle vue panoramique sur la Nive et quelques monts basques. L'hôtel le Bellevue domine ce boulevard qui s'en va jusqu'à l'église Saint-Laurent, bordée par l'ancien cimetière abritant de nombreuses stèles discoïdales et tabulaires basques du XVIIe siècle ainsi que des dalles funéraires du XVIIIe siècle.
Ça n'en a peut être pas l'air, mais je suis en train de chercher la chapelle aux Icônes. Mais bon, puisque je suis devant l'église Saint-Laurent, je vais entrer voir ses intérieurs.
Construite au XVIIème siècle sur l'emplacement d'une ancienne paroisse datant du XIIème siècle, elle a été remaniée plusieurs fois, notamment son clocher autrefois triangulaire modifié pour devenir octogonal à la fin du XIXème siècle.
ENTRONS !
C'est beau. C'est coloré. C'est haut.
Mon regard est de suite interpellé par l'imposant retable en bois doré et sa peinture du Martyre de Saint Laurent, datant du XVIIème siècle et classés aux monuments Historiques.
Le retable baroque, œuvre de Jean-Baptiste Dartiguecave (1651-1741), présente des statues, des pampres et fruits sculptés sous une corniche denticulée couronnée de la Croix adorée par les anges.
L'autre particularité de l'intérieur de cette église basque, ce sont les étages de tribunes en bois sculpté que l'on peut parcourir et emprunter pour avoir une vue d'ensemble.
Je parcours ces étages à la recherche des "petits détails" et autres ornements.
Je regagne la terre ferme pour me diriger vers la sortie de l'édifice religieux. Sur la gauche de la sortie, uen statue que je n'avais pas vu en entrant.
Il s'agit d'une représentation de Saint-Léon-de-Carentan (856-890), patron de la ville de Bayonne, évêque de Bayonne et évangélisateur du Pays Basque. Il est mort décapité par les Vikings en même temps que ses frères Philippe et Gervais.
Cette représentation de l'évêque avec sa tête décapitée qu'il tient entre ses mains rappelle la légende comme quoi, décapité près de la Nive, il se tint encore debout une heure, puis il releva sa tête tombée à terre et la porta à une distance de 80 pas, jusqu'à un lieu où jaillit une fontaine réputée depuis miraculeuse.
Mais où se trouve cette fontaine ? Ça, personne le sait. Hein ? Ah bon ? On me fait signe dans l'oreillette que c'est peut être la fontaine Saint-Léon, à Bayonne, au bout de l'avenue Paul Pras.
BON BREF !
Je sors de l'église Saint-Laurent. Je marche un peu sur le boulevard des Terrasses en espérant trouver un panneau touristique indiquant la direction de la Chapelle aux Icônes. Mais rien. Par contre, je suis soudainement tombé nez à nez avec ce panneau intrigant.
LE PITCH : "Il y a bien longtemps dans une station thermale lointaine, très lointaine...
La galaxie est en paix, gouvernée par la glorieuse République et protégée par les nobles et sages Chevaliers Jedi.
En tant que symbole de paix, la République s'apprête à lancer Starlight Cambo dans les confins de la Bordure Extérieure du Labourd. Cette nouvelle station balnéaire apportera une lueur d'espoir à tous et soignera les rhumatismes de tous les chevaliers Jedi survivants.
Mais alors qu'une magnifique renaissance se répand à travers le Pays Basque, un nouvel adversaire effrayant apparait également : le rhume. Maintenant, les gardiens de la paix et de la justice doivent faire face à une menace pour eux-mêmes, la galaxie et la Force elle-même ... Ils vont devoir ne pas succomber complètement aux Délices de la Force..."
Mais, en fait, après avoir regardé au-dessus de ce titre non prometteur annonçant un épisode grabataire, j'aperçus qu'il s'agissait de l'enseigne d'une biscuiterie artisanale renommée de la commune.
La rue de la Bergerie est en fait une rue de quartier, banale, simple, sans attrait touristique. Je ne dis pas cela méchamment, je dis ça parce que je m'attendais à un coin isolé, aménagé pour la chapelle. Mais non.
Je me gare en haut de la rue de la Bergerie, sur un parking d'où partent des chemins de randonnées pour la colline et le parc de la Bergerie. Tout ceci est dominé par le Mondarrain... euh non, par le Mont Ursuya.
C'est petit, mais massif. Blanc. Loin des structures habituelles d'une chapelle. Longue de dix mètres, l'édifice religieux à la façade blanchie à la chaux a ainsi édifié dans le style local labourdin dans les années 1960 à l'initiative de l'abbé Courtelarre. Ce dernier dirigeait un centre médico-psychologique pour les prêtres qui souffraient de maladies mentales. Il leur proposait différentes activités, comme la peinture et la sculpture, mais les prêtres n'accrochaient pas vraiment. C'est alors qu'il eut l'idée d'un projet plus grand avec la construction de cette chapelle.
Mais, au milieu des années 1960, le chantier doit fermer et la chapelle reste inachevée... du moins ses intérieurs. Elle est tout de même inaugurée en 1964 et porte alors le nom de chapelle d’Artzaindeia (qui signifie en basque "l’appel du berger").
Mais l'abbée Courtelarre restera frustré de ne pas avoir "habillé" l'intérieur de la chapelle... jusqu'à son retour de voyages en Orient et en Terre Sainte...
Quand on la voit d'extérieur, on a du mal à imaginer ce qui se cache à l'intérieur. Afin de ménager la découverte et la surprise, je fais un peu le tour pour remarquer la pluralité des vitraux aux formes géométriques elles aussi originales. Quelle peut être la lumière qui en découle à l'intérieur ?
A l’arrière de l’autel, je remarque une belle succession de rectangles de différentes tailles. Ces vitraux ont été réalisés par le père de Sooz. Par la suite, c'est le maitre verrier Gérald Franzetti qui créera des dalles de verre aux motifs abstraits. Gérald n'est pas un inconnu dans la région puisqu'on lui doit des créations, mais aussi beaucoup de restaurations de vitraux, comme ceux de la façade centrale Art Déco de l'hôtel Getaria à Guéthary, On lui doit également l'entretiens des vitraux de la cathédrale bayonnaise Sainte-Marie, de l’Eglise Sainte-Eugénie à Biarritz et d’autres édifices classés.
Et maintenant,
attention, poussons la porte...
Ah merde,
c'est fermé !
Non,
je déconne !
Une fois la porte poussée
et les premiers pas franchis dans la chapelle,
voici la vue.
Alors, bon, on ne peut pas rester comme ça, à regarder les différentes fresques, les détails et les couleurs sans savoir pourquoi, comment, parce que.
Cette entrée dans la chapelle me rappelle en premier lieu ma visite à l'église de Notre-Dame du Menoux, dans l'Indre, avec ses fresques monumentales réalisées par l'artiste bolivien Jorge Carrasco.
Revenons à Cambo-les-Bains et dans la chapelle aux Icônes.
L'abbé Courtelarre, surnommé"le Lion", revient dans le Pays Basque et à Cambo-les-Bains dans le milieu des années 1980 après son long voyage en Orient et en Terre sainte. Durant ce périple, il a visité plusieurs édifices religieux, a découvert les icônes et fait plusieurs photos avec une idée "Et si les icônes venaient illustrer l'intérieur de la chapelle de Cambo."
ICÔNE : petite image symbolisant, en informatique, un élément, comme un programme ou un document, auquel elle est associée.
Icône religieuse, image représentant une figure religieuse dans la tradition chrétienne orthodoxe.
Il prend contact avec l'artiste-peintre figuratif Albert Proux, originaire de Saint-Jean-de-Luz, ex fonctionnaire de police. Ce dernier accepte le défi bien qu'il n'ait jamais réalisé ce genre de travail. En février 1984, il se lance alors dans la documentation en consultant les fresques des églises orthodoxes russes. Dans le même temps, l'abbé Courtelarre lui projette des diapositives de ses photos sur les murs de la chapelle à l'aide d'un épiscope. Albert Proux les retranscrit dans une lumière jaune. Des inscriptions basques sont ajoutées aux icônes évoquant symboliquement les scènes de la vie biblique.
C'est ainsi qu'apparait et que prend forme une profusion de couleurs. Les travaux se terminent pour l'Assomption, en août 1985, et la chapelle peut enfin être inaugurée, vingt ans après son édification.
J'avance dans la petite allée centrale. Sur les côtés, les fresques se succèdent.
Je m'attarde sur quelques déétails dans certaines fresques qui représentent tour à tour le baptême du Christ, la Dormition entourés des apôtres et des anges.
Je passe devant l'autel où la lumière traverse les vitraux modernes pour venir se poser sur le pupitre.
Et puis je me retourne pour admirer le fond de la chapelle par l'entrée.
Très impressionnant et prenant cette rencontre avec la chapelle aux Icônes.
Je reste un peu dans ce lieu silencieux.
Et puis, je ressors.