Quantcast
Channel: LE VOYAGE DE JéNORME
Viewing all articles
Browse latest Browse all 380

PARIS MONTMARTRE, plein Ouest (75)

$
0
0

C'est l'été et plutôt que de se rendre à la plage, Jénorme a décidé d'aller faire un tour à Paris, et plus précisément dans le 18ème arrondissement, et plus précisément sur la Butte Montmartre, et plus précisément quand soudain, ne voilà-t-il pas...

 

Lors du précédent épisode montmartrois, je me suis rendu compte que je n'avais pas parlé des origines et du mot même "Montmartre" en posant cette question fatidique : qu'est-ce que ça veut dire ?
Alors, tout de suite, sans plus attendre, dès maintenant et sans faire de détour en allant de suite dans le vif du sujet afin de traiter au plus vite et sans se répandre sur d'autres faits qui ne feraient que nous amener vers des chemins détournés qui n'auraient rien à voir avec le sujet même dont nous allons parler désormais une fois que le titre aura étéécrit, c'est à dire :  MONTMARTRE ORIGINES ! Et paf !

Oui, avant d'être la célèbre butte parisien connue dans le monde entier pour ses artistes, ses moulins, ses restaurants, ses caricaturistes, ses etc, Montmartre fut longtemps un village hors de Paris. Son nom a sans doute pour origine Mons Martis (le mont de Mars), car la butte était l'emplacement d'un temple dédiéà Mars, dieu de la guerre, sous la période romaine. Un second temple, dédiéà Mercure, s'y trouvait également.
Une seconde origine étymologique possible a été soulevée : le mont du martyre, car elle fut, selon la légende, un lieu de passage important de saint Denis, premier évêque de Paris, qui aurait survécu à son exécution, comme nous avons pu le voir dans notre précédent épisode parisien, lors de notre traversée du square Suzanne Buisson. D'ailleurs, une des rues historiques menant à Montmartre s'appelle rue des Martyrs en résonance au parcours de Saint Denis qui marcha sur cette route, tenant sa tête entre les mains, avant de s'écrouler quelques kilomètres plus au nord, où fut fondée la basilique Saint Denis.
Aujourd'hui, la rue des Martyrs est reconnue pour héberger le cabaret "Chez Michou"et la salle de spectacle "Le divan du monde" (rendue célèbre par les affiches de Toulouse-Lautrec lorsque cette salle s'appelait "Le divan Japonais"). C'est dans cette même rue des Martyrs qu'habitait, au n°40, le compositeur Maurice Ravel entre  1875 à 1880 ; alors que le peintre Théodore Guéricault logeait au n°49 pendant que son atelier où il ne peignit pas le "Radeau de la méduse", se trouvait au n°23. C'est également dans cette même rue que le peintre chuta de cheval en août 1823 et se brisa le dos. Alité et paralysé, il mourra le 26 janvier 1824 de ce mal.

Mais pourquoi je parle de la rue des Martyrs alors que je n'y suis pas passé ?
Reprenons où nous en étions par rapport à notre précédent épisode titré :
"PARIS MONTMARTRE : RUE LEPIC, AVENUE JUNOT ET ALLÉE DES BROUILLARDS" !

Petit rappel des faits : après être parti de la Rue Lepic, j'ai rejoins le Moulin de la Galette, l'Avenue Junot, la Villa Léandre,... pour arriver sur la Place Dalida.

Paris, Place Dalida (75)
Statue de Dalida en contre-plongée

Ça fout les boules !!!! On dirait Dark Vador, mais sans le masque, mais avec deux grosses boules dorées sur le torse à la place ! Dalida Vador !
Lorsque j'étais passé par là il y a quelques années, les seins du buste étaient encore sombres. Va savoir qui décide un jour qu'il faut caresser telle partie d'une statue ou d'un buste pour que cela porte bonheur ou que cela provoque paix et prospérité... Cela rappelle cette statue de Juliette qui se trouve à Vérone (Italie) et dont les femmes touchent le sein droit pour s'assurer bonheur, amour éternel et fertilité.
Tiens, faisons un rapide inventaire de ces statues et autres monuments porte-bonheur si on les touche.
    - Toucher le nez de du médaillon en bronze du visage de Lincoln situé sur sa tombe à Springfield (Etats-Unis) porterait bonheur.
    - Dans le château de Blarney situéà Cork en Irlande, le fait d'embrasser la pierre de Blarney la tête en bas apporterait le don d'éloquence.
    - Sur la Grand Place de Bruxelles, frotter le bras de la statue en bronze d’Everard’t Serclaes donne le droit de faire un vœu.
    - Si tu touches les cornes du taureau de la bourse de Wall Street (New York), tu auras de la chance. Si tu touches ses testicules, tu auras de l'argent.
    - Sur la façade de l'hôtel de ville de Mons, on peut voir la statue en bronze d'un petit singe dont le haut de la tête est usé. La raison : si tu caresses sa tête avec la main gauche, ton voeu se réalisera.
    - À Istambul, en Turquie, la Colonne qui pleure est recouverte par une très vieille plaque en cuivre trouée au milieu. Si tu y mets le doigt et que celui-ci en ressort mouillé, toutes tes maladies seront guéries.
    - Au cimetière du Père Lachaise, c'est le gisant de Victor Noir qui intrigue. Pour les femmes en mal d'enfants, il leur faudrait caresser les parties intimes du gisant pour devenir fertiles.
On peut également évoquer la Chouette de Dijon (France), le pied de la statue de John Harvard à Cambridge (États-Unis), la statue du chien Hachiko à Tokyo (Japon), l'orteil de la statue de Grgur Ninski à Split (Croatie), la représentation de Saint Jean Népomucène sur le relief du Pont Charles à Pragues (République Tchèque),...

Je quitte la place Dalida pour emprunter la rue de l'Abreuvoir.

 

RUE DE L'ABREUVOIR
Paris, rue de l'Abreuvoir (75)

Qui dit "Rue de l'abreuvoir", dit "abreuvoir". Logique, normal, classique, ok ! Mais d'abreuvoir de nos jours, il n'y en a plus dans cette rue aujourd'hui. Il se trouvait au n°15 ; c'est à dire tout à fait en bas, sur la droite, à l'angle de la rue Giradon, face à la statue de la place Dalida. Il est à présent remplacé par une sorte d'immeuble avec quelques appartements de particuliers. Finis les songes de Gérard de Nerval qui écrivait alors en 1854 ces quelques mots au sujet de ce lieu de convivialité :
"Ce qui me séduisait avant tout dans ce petit espace abrité par les grands arbres du château des Brouillards, c'est d'abord ...., c'est ensuite le voisinage de l'abreuvoir qui, le soir, s'anime du spectacle des chevaux et des chiens que l'on baigne .... "

À l'origine, la rue de l'Abreuvoir se nommait "Rue qui va au but", mais là non plus aucune trace de but, ni de gardien de but, ni d'un quelconque supporter footbalistique dans les parages.
C'est également dans cette rue en pente que débute la nouvelle de Marcel Aymé, "Les Sabines"(1943), dont voici le synopsis :
"Il y avait à Montmartre, dans la rue de l'Abreuvoir, une jeune femme prénommée Sabine, qui possédait le don d'ubiquité. Elle pouvait à son gré se multiplier et se trouver en même temps, de corps et d'esprit, en autant de lieux qu'il lui plaisait souhaiter. Comme elle était mariée et qu'un don si rare n'eût pas manqué d'inquiéter son mari, elle s'était gardée de lui en faire la révélation et ne l'utilisait guère que dans son appartement, aux heures où elle y était seule."

Paris, rue de l'Abreuvoir, n°12Sur la photo ci gauche, on peut distinguer une grande maison blanche adossée à la colline où on y vient à pied, où on ne frappe pas, où ceux qui vivent là ont jeté la clé, San Francisco s'embrume, San Francisco oùêtes vous...
Portant le n°12, ce n'est pourtant pas ici qu'habite le chanteur-compositeur Maxime Le Forestier. Ben non. Cette belle et longue demeure était autrefois occupée par le peintre impressionniste Camille Pissarro (1830-1903). Il eut ici pour élèves, entre autres, Paul Cézanne, Paul Gauguin, Jean Peské et Henri-Martin Lamotte.

 

 

Paris, rue de l'Abreuvoir, LachouqueUn peu plus haut, mais pas tant que ça, apparaît une grande maison aux murs recouverts de lierre, dont l'entrée est gardée par deux aigles en plâtre. Mais qui habite ici ? Une ancienne personne de l'armée romaine ? Un Allemand ? Un ancien nazi ? Un adepte de la nature et des rapaces ? Un sculpteur ? Un collectionneur d'animaux en plâtre ?

Oh que non ! Il s'agit de l'ancienne demeure du commandant Henry Lachouque (1883-1971), historien de Napoléon et de la Grande Guerre.

Paris, rue de l'Abreuvoir, Lachouque (75)        


Sur la même façade, on découvre un cadran solaire peint en bleu, aujourd'hui recouvert par le lierre. Datant de 1924, il représente un coq accompagné d’une devise humoristique : "Quand tu sonneras je chanterai".

Je monte dans cette rue de l'Abreuvoir pour atteindre une bâtisse d'angle colorée. Là non plus, ce n'est pas la demeure de Maxime Le Forestier car la maison, bien qu'adossée à la colline, n'est pas bleue, mais rose.

Paris, rue de l'Abreuvoir, maison rose (75)

Elle est également appelée "Maison Rose de Maurice Utrillo".
"Né rue du Poteau en 1883, Maurice Utrillo est le fils de Suzanne Valadon, acrobate et modèle encouragée par Degas, Toulouse-Lautrec et Renoir à développer un puissant talent expressionniste. Après un premier internement à Sainte-Anne dès 1900, sa mère l'initie à la peinture sur le conseil des médecins. Aussi attaché au décor urbain que Valadon au portrait, Utrillo rompt avec la tradition paysagiste pour créer une poétique de la ville irisée de mélancolie : l'essentiel de son oeuvre est une description des rues de Montmartre, animée d'un soucis de perfection dans le réalisme proche des peintres naïfs."  MAIRIE DE PARIS

Maison rose, Maurice Utrillo             maison_rose_utrillo
Maison rose, par Maurice Utrillo

Aujourd'hui, la Maison Rose est devenu un bar-snack avec des prix défiants toute concurrence. Un exemple ? Fastoche ! Le jambon-beurre : 11 euros !
Prenons à gauche pour tomber dans la Rue des Saules face aux célèbres vignes de Montmartre.

 

RUE DES SAULES
Paris, Montmartre, la vigne

Des vignes en plein centre-ville ? Ben oui. Et contrairement à ce que l'on pourrait penser, elles ne sont là que depuis 1930. Elles ont été plantées par la Commune Libre et la République de Montmartre afin de lutter contre l'expansion immobilière. 3250 pieds de vigne pour donner chaque année un cru nommé"le Clos Montmartre", dont l'argent de la récolte (500 litres de vin récoltés et élaborés selon les méthodes traditionnelles) est reversé au profit des oeuvres sociales du XVIIIème arrondissement.

Juste en face de la vigne, côté chiffres impairs de la rue, un petit square pour se mettre à l'ombre : le square Roland Dorgelès (1885-1973).

Paris, Square Roland Dorgeles

Un tag, une plaque rappelant cetet citation de l'écrivain-journaliste, membre de l'Académie Goncourt : "Je hais la guerre, mais j'aime ceux qui l'ont faite".
Roland Dorgelès est l'auteur du roman "Les croix de bois" (1919), inspiré de son expérience de la guerre. Pour participer à celle-ci, il demanda l'appuis de Clémenceau après avoir été réformé par deux fois pour raison de santé.
Roland Dorgelès est également l'auteur de plusieurs autres romans, faisant parfois état de la vie montmartroise de l'époque :
"Chez nous, on se serait cru à la campagne. Pas d'autobus, pas de grands immeubles, pas de trottoirs encombrés. Chaque carrefour avait sa borne fontaine, chaque maison son bout de jardin […] Pas de magasins non plus : qu'en ferait-on dans un village ? Juste ce qu'il faut de boutiques pour rendre service aux ménagères : une boulangerie et un fruitier. Quand on voulait d'autres provisions, on descendait rue Lepic, où les marchandes poussaient leurs petites voitures, et l'on rentrait du marché avec des filets pleins. (...)
Seuls, les artistes étaient partout chez eux, prenant le chocolat avec les pèlerins, l'apéritif avec les arsouilles et déjeunant chez le bistrot avec les peintres en bâtiment". 
LE CHÂTEAU DES BROUILLARDS, 1973

Fait moins majeur, mais déroutant, il est également connu pour avoir monter en 1910 avec ses amis du cabaret du Lapin Agile, une énorme fumisterie où il fait passer un tableau peint par un âne, et intitulée Et le soleil s'endormit sur l'Adriatique, pour une œuvre d'un jeune surdoué nommé Joachim-Raphaël Boronali (anagramme d'Aliboron...) à l'occasion du Salon des Indépendants.

Et le soleil s'endormit sur l'AdriatiqueEt le soleil s'endormit sur l'AdriatiqueJ R BORONALI, 1910
Huile sur toile, 54 81, Espace culturel Paul Bédu, Milly-la-Forêt (France)

"Le 8 mars 1910, Roland Dorgelès emprunte Lolo, l'âne de Frédéric Gérard, dit le père Frédé, tenancier du Lapin Agile, un cabaret de Montmartre. En présence d'un huissier de justice, maître Brionne, Dorgelès fait réaliser un tableau par Lolo l'âne à la queue duquel on a attaché un pinceau.

Chaque fois que l'on donne à l'âne une carotte celui-ci remue frénétiquement la queue, appliquant ainsi de la peinture sur la toile.
Dorgelès explique sa motivation pour "montrer aux niais, aux incapables et aux vaniteux qui encombrent une grande partie du Salon des indépendants que l'œuvre d'un âne, brossée à grands coups de queue, n'est pas déplacée parmi leurs œuvres."."WIKIPEDIA

 

 
Et justement, tiens, puisque l'on parle du Lapin Agile, eh bien le voilà, juste en face du square et en bas de la vigne montmartroise.

LE LAPIN AGILE
Paris, le lapin agile

"Au rendez-vous des voleurs", puis "Le cabaret des assassins", puis "À ma campagne" sont les noms portés successivement par ce bâtiment original construit en 1795 au 22 rue des Saules. C'est à cette période et suite à la construction du mur des Fermiers généraux que le bas de Montmartre est décrété"zone de plaisirs". Prostituées et marginaux de toutes sortes s'y côtoient alors que le haut de Montmartre, jusqu'en 1914, est un village où l'air pur se diffuse sur ses moulins et ses logements à bas prix. Ce "bon vivre" attire une population artistique dense.

Paris, le lapin agile, entréeEntre 1879 et 1880, le propriétaire de l'époque confie au caricaturiste André Gill, familier des lieux, la confection d'une enseigne ; celui-ci peint un lapin vêtu d'une redingote verte et d'une écharpe rouge s'échappant de la marmite qui lui était destinée : le cabaret devient alors connu sous le nom Au Lapin à Gill, bientôt transformé en Lapin Agile.
Le lieu est racheté en 1886 par une ancienne danseuse de cancan, Adèle Decerf, surnommée la mère Adèle. Après s'être débarrassée de la clientèle douteuse, elle conçoit un café-restaurant-concert baptiséÀ ma campagne. Le chansonnier Aristide Bruant en devient un habitué et y amène le peintre Henri de Toulouse-Lautrec et l'écrivain Georges Courteline. Des concerts d'amateurs ont lieu le samedi soir et le dimanche matin. Au début des années 1900,  la mère Adèle revend le cabaret à Berthe Sébource qui s'y installe avec sa fille avant d'être rejointes par Frédéric Gérard, dit Le Père Frédé qui va faire du lieu un endroit incontournable de la bohème artistique montmartroise. Lorsqu'il emménage au Lapin Agile, il garde avec lui son singe, son chien, son corbeau, ses souris blanches, ainsi que son âne, avec lequel il vend du poisson dans les rues de Montmartre, afin de compléter ses revenus.
Il n'hésite pas à offrir des repas et des boissons dans son cabaret aux artistes désargentés, en échange d'une chanson, d'un tableau ou d'un poème. C'est ainsi que Picasso, notamment, lui céda un jour l'Arlequin au verre (1905), que le Père Frédé revendit pour quelque sous en 1912. Proposé aux enchères en 1980, l'Arlequin au verre fut revendu 40 millions de dollars.
Promis à la démolition en 1913, Aristide Bruant rachète le cabaret et confie la gérance au Père Frédé. Max Jacob, André Salmon, Paul Fort, Gaston Couté, Apollinaire, Picasso, Charles Dullin, Modigliani... sont des habitués et y côtoient des anarchistes et des criminels venus du bas-Montmartre et de la Goutte d'Or.

Paris, le lapin agile (75)                Paris, le lapin agile, entrée (75)

Cette époque insouciante s'achève le 1er août 1914, avec la proclamation de la mobilisation générale contre l'Allemagne. La plupart des habitués du Lapin Agile sont mobilisés sur le front et beaucoup n'en reviendront pas. Après La Grande Guerre, le Lapin Agile a perdu son statut de lieu de rencontre des écrivains et des artistes de l'avant-garde. Cette mouvance s'est déplacée sur Montparnasse, puis à Saint-Germain-des-Près. Quelques artistes viennent parfois faire un tour dans ce lieu historique, comme Pierre Brasseur, Georges Simenon, et quelques Américains de passage à Paris (Rudolph Valentino, Vivien Leigh et Charlie Chaplin).
Le Lapin Agile poursuit tant bien que mal ses activités pendant l'Occupation, et redevient après 1945 un lieu de rencontre et un tremplin pour les artistes : Alexandre Lagoya, Léo Ferré, Claude Nougaro.
En 1972, Paulo Gérard cède la gestion du cabaret à son beau-fils Yves Mathieu qui en est toujours le propriétaire : des "veillées" y sont encore organisées, au cours desquelles se produisent chanteurs et humoristes.

Je continue de descendre la Rue des Saules en longeant le mur du cimetière Saint-Vincent dans lequel reposent Marcel Aymé, Marcel Carné, Eugène Boudin, Roland Dorgelès, Maurice Utrillo, Harry Baur, Claude Pinoteau,...

Paris, rue des Saules, tente (75)En face, juste avant d'emprunter les premiers escaliers, à l'angle de la rue des Saules et de la rue Paul Féval, je croise une tente. Ce n'est pas la première que je vois à Paris aujourd'hui. Un peu avant, j'en avais croisée une autre dans un recoin des escaliers de la rue Juste Métivier.

 

 

 

 

 

Je traverse la large rue Caulaincourt pour prendre d'étroits escaliers raides, figures architecturales emblématique de ce versant Nord-Est de la butte Montmartre. On pense aux photos de Brassaï ou de Doisneau.
Je passe devant le n°49 où, derrière les grilles, une plaque commémorative nous rappelle qu'ici des familles juives ont été raflées par la police collaborationniste française avant d'être déportées a camps d'Auschwitz en juin 1944 dans le convoi n°76.

Paris, rue des saules, plaque (75)             Paris, rue des saules, plaque

Dans ce convoi figuraient également les grands-parents de Bernard Kouchner, le chimiste et historien Georges Wellers, le rabbin Mathieu Wolf. 1100 déportés, dont 161 enfants. Seuls 167 survivants de ce convoi, dont 100 femmes, reviendront d'Auschwitz.

Je continue de descendre la Rue des Saules qui a quitté son côté montmartrois, calme et bucolique, pour évoluer dans un univers plus urbain et bruyant. À l'angle de la rue Francoeur, je découvre un bâtiment original : le Funambule.

Paris, rue des Saules, le funambuleSalle de spectacle montmartroise, Le Funambule a ouvert en 1987. Tout petit, coincé entre deux grands immeubles, il possède une salle de cent places, un bar et un restaurant. Il propose plusieurs sortes de spectacles, essentiellement des de théâtre contemporain. On peut y voir aussi des One Man/Woman Show de jeunes artistes en devenir...
En 1999, la pièce d'Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri, "Cuisine et dépendance" y avait été jouée pendant trois ans.

Paris, rue des Saules, le funambule (75)

 

OK, bon alors là, par contre, c'est chiant parce que pour revenir sur la butte Montmartre, il me faut faire demi-tour et revenir sur mes pas DONC remonter toute la rue des Saules. Escaliers, re-passage devant le cimetière, le Lapin Agile, la vigne, le square... pour atteindre la rue Cortot.

 

RUE CORTOT
Paris, musée de Montmartre (75)

Ancienne Petite Rue Saint-Jean, elle doit son nom au sculpteur Jean-Pierre Cortot (1787-1843).
Dans cette rue étroite et pavée, au n°12, on découvre le musée de Montmartre.

C'est parait-il la plus ancienne maison de la butte Montmartre. Autrefois appelée "maison du Bel Air", construite au XVIIème siècle, c'est un ensemble de batisses de pierres blanches se trouvant aujourd'hui.
Autrefois, c'était un lieu de rencontres artistiques. Auguste Renoir y loua un atelier de 1875 à 1877 pour y réaliser quelques-unes de ses oeuvres majeures, telles que Le bal du Moulin de la Galette (1876) et La Balançoire (1876). Les trois jardins entourant le musée portent d'ailleurs le nom du peintre et offrent une vue magnifique sur les vignes montmartroises.
Suzanne Valandon et son fils Maurice Utrillo ont également habité ici de 1912 à 1926. Une salle leur est d'ailleurs attribuée, l'atelier Valandon-Utrillo, recréant le lieu de travail des peintres.
D'autres artistes ont également vécu ici : les peintres fauves Émile-Othon Friesz et Raoul Dufy, Emile Bernard, Maximilien Luce, Francisque Poulbot, Charles Camoin, André Utter, ou encore par les écrivains Léon Bloy et Pierre Reverdy, ou encore André Antoine, le fondateur du théâtre libre.
Le musée de Montmartre abrite aujourd'hui quelques peintures, affiches et dessins signés Toulouse-Lautrec (Le divan japonais), Modigliani, Kupka, Steinlen (Le cabaret du chat noir), Valandon (L'autoportrait), Utrillo (La place Pigalle),... Il retrace également la vie de bohème montmatroise et possède une salle entière dédiée au french Cancan.
Le prix d'entrée n'est toutefois pas donné : 9,50 euros !

 

Dans cette rue, au n°8, ont habité le peintre Edmond Heuzé (1884-1967) et son ami David Laksine (1888-1911), peintre-sculpteur. Ne pouvant plus payer leur loyer, ils errèrent dans Paris, où Laksine se jettera par désespoir du pont des Arts dans la Seine le 2 février 1911.
"Au bout de quelques jours, la misère devient plus complète, et plus affreuse. Il partageait avec moi, ce qu'il n'avait pas. (C'est Heuzé qui parle), Nous guettâmes le moment où la concierge partirait. Elle avait un chien ; dans son écuelle il restait encore de la soupe de la veille. Nous sautâmes sur cette soupe et nous mangeâmes ce qu'il en restait." Edmond Heuzé, extrait d'Alphonse Quizet et ses amis, de Martine et Bertrand Willot.
Pendant une trentaine d'années, Edmond Heuzé vivra de plusieurs métiers très divers. Nénesse le fait entrer sous le pseudo de "Williams" comme danseur dans la troupe du Moulin Rouge avec La Goulue, ce qui lui permet de faire le tour du monde. Il devient également marchand, intermédiaire, camelot, régisseur de cirque ambulant, danseur de claquettes chez Maxim's, etc. C'est dans cette dernière profession qu'il aura l'occasion de peindre le monde du cirque à ses moments de loisirs. Il épouse Nina Bacquet, la directrice du cirque Médrano. Réformé en 1904, il s'engage comme volontaire en 1914. Conservateur de la collection d'émaux du grand-duc Nicolas Mikhaïlovitch de Russie, gardien au magasin d'habillement du 22ème régiment d'infanterie, il devient en 1918 directeur de la Galerie Sagot où il vend les toiles de ses amis Utrillo, Valandon, Rouault ainsi que ses propres toiles. C'est ainsi que les douze tableaux de sa série "Les masques" seront vendus en deux jours. Grâce à la générosité de Georges Chéron, marchand de tableaux, il peut recommencer à peindre...

Heuzé, clown         Heuzé, le clown
Peintures : Gazette-Drouot

 

Non loin de là, au-dessus du n°6 de la rue une discrète plaque nous avertit que c'est ici qu'a vécu le compositeur Erik Satie de 1890 à 1898.

Paris, Montmartre, maison Erik Satie (75)Né en 1866 à Honfleur et ami des poètes comme Mallarmé, Verlaine et  Pierre Contamine, Erik Satie loge au second étage dans une petite chambre pour laquelle il aime à dire :"Je vis dans un placard au coin de mon froid.". Il fréquente à cette époque le Cabaret du Chat Noir.
C'est également ici qu'il fait la connaissance de Suzanne Valndon, le 18 janvier 1893. Une relation amoureuse s'installe entre eux et, bien qu’il l’ait demandée en mariage après leur première nuit, celui-ci n’aura jamais lieu. Satie qui, dans sa passion pour elle, l’appelle sa Biqui, rédige des notes enflammées sur "tout son être, ses beaux yeux, ses mains douces et ses pieds minuscules" ; Il compose également à son intention ses Danses Gothiques tandis qu’elle réalise son portrait. Cinq mois plus tard, le 20 juin, leur rupture brisera le compositeur  "avec une solitude glaciale remplissant la tête de vide et le cœur de tristesse". Comme pour se punir lui-même, il compose Vexations, un thème construit à partir d’une mélodie courte, à propos de laquelle il note : "Pour se jouer 840 fois de suite ce motif, il sera bon de se préparer au préalable, et dans le plus grand silence, par des immobilités sérieuses". Des interprètes comme John Cage ou Thomas Bloch jouent la pièce dans son intégralité (soit 840 fois) durant presque 20 heures.
Les années suivantes, Erik Satie travaillera avec des artistes divers, comme Maurice Ravel, Albert Roussel,  Jean Cocteau, Pablo Picasso, Tristan Tzara,...
Ce n'est qu'à sa mort en juillet 1925 et en découvrant l'état de son appartement dans lequel personne ne pouvait entrer, que ses proches se rendront de la misère dans laquelle il vivait, misère qu’il surnommait "la petite fille aux grands yeux verts". Ne pouvant vivre de ses talents de musicien, il ne se plaignait toutefois pas ou très peu.

Allez musique !

 

Ouais, c'est la fête !!!! Bon... euh... Tiens, j'arrive au bout de la rue de la Déprime... de la rue Cortot pour rejoindre la rue du Mont Cenis.

 

RUE DU MONT CENIS
Paris, Montmartre, panorama nord

Partant de la célèbre Place du Tertre, la rue du Mont Cenis s'en va rejoindre le boulevard des Maréchaux. Elle s'étend ainsi sur une longueur de 1304 mètres vers le Nord de Paris.
D'ici, un panorama sur la banlieue nord parisienne se découvre jusqu'à plus de 30 km.

Paris, Montmartre, panorama nord (75)
Panorama

Nous pouvons apercevoir une sorte de soucoupe volante blanche qui n'est autre que le Stade de France, bien connue pour avoir accueilli en 1998 la finale de la Coupe du Monde. C'est le plus grand stade de France... oui... avec 81 338 places disponibles. Si, si, très précisément, je suis allé compter moi même.

Je quitte la petite esplanade pour arpenter le pavé en direction du sud de la butte.
À partir d'ici, cela devient un peu le bordel. Nous sommes au coeur de la zone touristique de Montmartre. Beaucoup de passants et de touristes. Beaucoup de boutiques de souvenirs et autres.
Je me faufile entre les photographes occasionnels voulant immortaliser je-ne-sais-quoi de ce Montmartre saturé et les caricaturistes haranguant la foule passagère pour croquer leur visage moyennant un billet.

Paris, montmartre village (75)

Je tourne à gauche pour me retrouver dans la rue du Chevalier de la Barre.

 

DANS NOTRE PROCHAIN ÉPISODE

Nous continuerons notre errance montmartroise en attaquant la partie sud de la butte.

 

 

 

 

 


Viewing all articles
Browse latest Browse all 380

Trending Articles